Les héros de mon enfance

Comédie musicale où les personnages des contes de fées bien connus revendiquent des changements dans le cours de leur histoire. Dans un langage piquant et coloré, ils révèlent des dessous de leur personnalité jusqu'alors inconnus et surprenants.

Gaétan Labrèche est un sorcier. Il a une façon de vous suggérer des idées tout en vous laissant croire que vous les avez eues vous-même qui tient à la fois du prodige, du miracle et du tour de passe-passe. Ainsi “Les Héros de mon enfance” est, au fond, une idée à lui mais j’ai l’impression d’y avoir pensé moi-même (j’écris ces mots dans un éclair de conscience mais je sens que l’enchantement ne tardera pas à se jeter à nouveau sur moi... ça y’est, je suis enchanté ... où en étais-je ... ah oui... ) tant son habileté à me faire découvrir mon besoin de me moquer des personnages de Perrault a été efficace (et démoniaque). Ce besoin, je le ressentais vraiment mais c’est Gaétan qui, à la lumière d ’une interview que j’ai accordée il y a six ou sept ans à Radio-Canada, est allé le débusquer, le cueillir, le dépoussiérer, le frotter, le polir et le faire miroiter à mes yeux pour qu’il devienne vital. Je crois bien qu ’il m’a un peu violé. Mais je n ’irai pas jusqu’à dire que je n’ai pas aimé ça. J’ai adoré écrire cette
pièce sous la baguette magique de Carabosse (ça, l’idée de faire jouer Carabosse par Gaétan, c’est vraiment de moi... ou était-ce plutôt.. . mon Dieu ... je ne m’y retrouve plus ...) et j’espère que le public saura se laisser charmer par la baguette magique de Gaétan. Sorcier dans la vie, méchante fée à la scène, mais cet homme est dangereux!

Michel

“Les Héros de mon enfance”
Mon enfance fut tiraillée entre “Pinocchio” et “Batman”, entre la Comtesse de Ségur et “Philomène”, entre “Yvan l’intrépide” et “Brick Bradford”, entre “Blanche Neige et les septs nains ” et “Soucoupes Volantes S-54”, entre “Le lièvre et la tortue” et Laurel and Hardy, entre “Le Journal de Tintin” et “Amazing Stories”, entre “Cendrillon” de Perrault et “Cinderella” de Walt Disney, entre “Miroir, miroir, dis-moi qui est la plus belle...” et “Panpan est toujours vainqueur! ”, entre le Marsupilami et les Martiens, entre le “Pan” des revolvers français et le “Bang ” des guns américains, entre Bernadette Soubirous et “Aurore, l’enfant martyr”, entre la très bretonne “Bécassine” et la très québécoise “Zézette”, bref, entre la lointaine et illusoire Europe et la tangible et terre à terre Amérique. Il ne faut donc pas s’étonner si le besoin de rire des références culturelles et des mythes européens s’est fait sentir chez moi plus tôt que le goût de m’amuser de mes racines américaines. Les personnages des “Héros de mon enfance” sont des imitations de Français évoluant dans un décor français factice et parlant un “français de France” emprunté, faux mais, évidemment, très châtié. La grammaire y est reine et le grand style fou du roi. Mes personnages sont, comme toujours, névrosés mais cette fois ils sont cultivés. Ils choquent le bon sens mais pas l’oreille! Leurs problèmes et leurs querelles sont très “culturels”. Et on peut en rire d ’autant plus qu ’ils ne nous concernent pas. Quand je décide de faire des heureux je vais jusqu’au bout!

Michel Tremblay

Note:
Pour faire plaisir à mes détracteurs, j’ai parsemé mon texte fleuri de mauvaise herbe d ’anglicismes. Voyez jusqu’où peut aller la générosité d ’un auteur de bonne humeur!
M.T.

Cher Michel,
Alors que le comédien Labrèche caressait, depuis longtemps, l’espoir d ’incarner un de tes personnages, le metteur-en-scène “du même nom” rêvait aussi, depuis longtemps, de diriger une création “Tremblayienne”. Voilà qu ’en cette année 1976, tu me combles doublement: — je mets en scène et avec beaucoup de joie ta plus récente pièce — et j’y participe activement sous les traits de Carabosse, personnage qui originellement devait être tenu par une comédienne mais que tu as décidé d’écrire pour moi. “Tremblay, mon bel ami tu t’attires des bosses, Puisque tu as voulu que je sois Carabosse ”. Tu est un auteur dont l’éloge n’est plus à faire; tes oeuvres passées ayant fait leur marque. Ta versatilité, ton imagination débordante, ton art de manier le verbe, relevés à la lecture de cette fantaisie musicale, n’ont fait que décupler l’admiration que je te portais déjà! Ma vision des “Héros de mon enfance ” rejoindra-t-elle la tienne? Je le souhaite ardemment: mon but premier étant de respecter la pensée de l’auteur.
Merci à toi d’avoir si spontanément accepté d ’écrire cette comédie. C’est frais, c’est léger, c’est estival... et j’aime ça! and one more time, baby, C’est frais, c’est léger, c’est estival... et j’aime ça!!!

Gaétan


Cher Sylvain,
Marjolaine m’ayant demandé d ’écrire un mot sur l’auteur de la musique, voici, jetées en bloc sur le papier, mes premières impressions sur le compositeur et l’homme:
— le connaissais et l’appréciais déjà comme poète et musicien
— a une sensibilité qui rejoint la mienne et celle de Tremblay
— a ajouté une couleur, une “touche ” personnelle
— a travaillé avec rapidité et disponibilité constante
— première participation à une comédie musicale mais sûrement pas la dernière
— collaboration dans le travail qui mènera à une amitié durable, je le souhaite
— a démontré une complicité et réceptivité totales sur l’oeuvre.
— je me surprends à fredonner “toutes” ses mélodies
— son sourire nous accompagne

Si je n ’ai pas voulu phraser de belle manière ces premiers jets du coeur c’est que, connaissant ta belle simplicité, j’ai préféré te les offrir à l’état brut.
Merci

Gaétan

Source des textes